écrits politiques

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Une analyse de Ghaleb Kandil
Si ce qui se passe en Syrie n’est pas une intervention étrangère, quel nom peut-on lui donner ?

En réaction aux événements en Syrie, de nombreux États et forces politiques utilisent souvent l’expression du « refus de l’intervention étrangère ». Mais ces prises de position s’apparentent à de l’hypocrisie lorsqu’elles ne sont pas s’accompagnées d’une dénonciation des pays qui soutiennent le terrorisme, car elles donnent l’impression que ce qui se passe actuellement en Syrie n’est pas une ingérence étrangère dans le but de mener une guerre à la place des États-Unis et d’Israël pour détruire la Syrie.

3 septembre 2012

L’intervention étrangère directe que les oppositions syriennes appellent de leur vœux est difficile à réaliser en raison de considérations stratégiques connues de tous, liées aux rapports de force en Syrie, aux équilibres régionaux et aux capacités de dissuasion de l’axe de la Résistance, sans oublier les relations de la Syrie avec la Russie et la Chine, ainsi que son alliance stratégique avec l’Iran.

Les stratèges américains, israéliens et atlantistes sont désormais convaincus qu’une invasion de la Syrie risque de provoquer une grande guerre dans la région et dans le monde, contre laquelle l’ancien secrétaire d’État américain, Henry Kissinger, a mis en garde. L’Occident craint qu’une telle guerre ne menace l’existence même d’Israël, les intérêts des États-Unis et la stabilité des gouvernements vassaux de l’Amérique dans la région.

Si ce qui se passe aujourd’hui en Syrie sur les plans politiques, militaires et de renseignements n’est pas une intervention étrangère, quel nom peut-on alors lui donner ?

Les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar, qui constituent l’alliance hostile à la Syrie, se répartissent les rôles sur les plans militaires, financiers, logistiques et de communication. Ils fournissent aux terroristes les photos satellites, les informations collectées par les espions, organisent des camps d’entraînement en Turquie sous l’égide de la CIA et d’autres services de renseignements étrangers, tandis que les réseaux de soutien logistique sont implantés en Jordanie et au Liban.

Les États impliqués dans la guerre contre la Syrie le reconnaissent. La seule appellation que l’on peut donner à ces agissements est l’intervention étrangère dans le but de détruire l’État syrien, de plonger le pays dans le chaos et les bains de sang et de provoquer une guerre civile. Les articles parus dans la presse occidentale sur la mobilisation et le déploiement en Syrie de jihadistes acheminés de Libye, de Tunisie, d’Afghanistan, de Tchétchénie, du Pakistan et des pays du Golfe, ne se comptent plus. Pire encore, des officiers de renseignements de pays de l’OTAN se trouvent sur sol syrien pour conseiller et diriger les groupes terroristes.

On ne peut prétendre dénoncer l’intervention étrangère en Syrie sans dénoncer tous les pays qui alimentent et soutiennent les groupes terroristes, et qui sont dirigés par les États-Unis. Ces États s’emploient à torpiller les tentatives de dialogue, en exerçant des pressions sur les opposants de l’intérieur et de l’extérieur, depuis le début de la crise.

Toutes ces réalités prouvent que la Syrie s’est trouvée aux prises, dès les premiers jours, avec une agression planifiée et téléguidée de l’étranger, avec la complicité de pays de la région et de puissances internationales.

Toute prise de position sur la situation en Syrie qui ne se baserait pas sur cette réalité n’a aucune valeur. Et les hommes libres dans le monde arabe et sur la scène internationale qui prétendent lutter contre l’hégémonie impérialiste, le sionisme et toutes formes de néo-colonialisme, doivent prendre en compte ces faits.

Déclarations et prises de positions

Bachar al-Assad, président de la République arabe syrienne

« Je peux résumer la situation en une phrase : nous progressons, la situation sur le terrain est meilleure mais nous n’avons pas encore gagné, cela nécessite encore du temps. Je pense que parler de zones tampons n’est premièrement pas une option qui est sur la table, et deuxièmement c’est une idée irréaliste même pour les États hostiles et ennemis de la Syrie. Les gens patriotes et les gens bien ne s’enfuient pas, ne quittent pas la patrie. Finalement, cette opération est positive, c’est une opération d’auto-nettoyage de l’État premièrement et de la nation en général. Il faut rendre hommage à l’armée et aux forces de sécurité qui, en combattant les rebelles à travers le pays, mènent des actes héroïques. Malgré les nombreuses erreurs, il existe un lien solide entre le régime et le peuple syrien. Tout le monde est inquiet pour sa patrie, c’est normal. Mais ils ne parviendront pas à disséminer la peur, ils n’y parviendront jamais. Je dis aux Syriens, le destin est entre vos mains et pas entre les mains d’autrui. »

Serguei Lavrov, ministre russe des étrangères

« Lorsque nos partenaires disent que le gouvernement syrien doit être le premier à arrêter le combat et à retirer toutes ses troupes et ses armes des villes, et alors seulement appeler l’opposition à faire de même, eh bien, cela c’est un schéma totalement irréalisable. Ou bien les gens sont naïfs ou bien il s’agit d’une sorte de provocation. Peu importe votre opinion sur le régime syrien, il est complètement irréaliste dans la situation actuelle, quand on se bat dans les villes, de dire que la seule solution réside dans la capitulation unilatérale d’un des protagonistes. Nous ne nous rangeons pas du côté d’un régime ou de personnes en Syrie. Nous fondons simplement notre position sur ce qui est réaliste. »

Ghaleb Kandil
New Orient News (Liban)
Rédacteur en chef : Pierre Khalaf
Tendances de l’Orient No 98, 3 septembre 2012.